Interlude bis : Guate by night - 1

Publié le par Don Chepe

 

Vendredi 13 : Une bonne date pour commencer un récit. Tout commence un vendredi 13. Quoiqu'en y repensant, tout a commencé la veille, lorsque j'ai dit à Affoue, "l'ivoirienne sculpturale qui prend deux f", que "tiens ce serait bien qu'on sorte ce WE, ça fait longtemps qu'on a pas été danser". "Ouais, non, pas demain, j'ai mieux à foutre". Mais ne voulant pas me laisser sur un échec aussi monumental, la sympathique jeune fille me rencarde avec une amie : Chana (au Guatemala, ils sont petits ET ils ont des noms bizarres - vous avais-je parlé d'Elmer the taxidriver et de tant d'autres ?). Il semble que la gamine organise une party quelque part en ville. Elle me refile son numéro. Je l'appelle. On convient d'un rendez-vous pour le lendemain. J'écrase une clope pour assoir la classe de l'instant. Je passe une soirée minable et solitaire chez moi.
Vendredi 13 donc. J'enfile une tenue excentrique lambda et me prépare à découvrir enfin ce que la ville offre d'activité nocturne. Je sors, en retard, de mon cours de tango. C'est le dernier cours avant la générale. Je téléphone à la petite. 9h dans une boîte inconnue. Je refile la demoiselle à "El Professor", qui parle espagnol en plus de connaitre la ville. Après description de l'endroit, "Rosa, dolce Rosa" qui partage le voyage s'enthousiasme en affirmant que l'endroit est trop cool. Elle a 18 ans. Je ne lui en veux pas. Le couple de "professores" m'assure, une fois la gosse déposée, de la sulfureuse réputation de ladite Chana et que cette soirée rendra certainement jaloux Xav', le trentenaire baroudeur. HARH HARH ! Avec un sourire sadique, je sors mon carnet et raye la 17ème croix de "péter la gueule à Xav'". Dtc le Xav, DTC ! J'arrive à 8h51.
L'entrée est dans un vieux parking glauque, derrière un couple de videur en pare-balle. J'allume un gros cigare pour signifier à ces pouilleux que je ne suis pas n'importe qui. Pour enfoncer le clou je ne tire qu'une bouffée. Comme d'habitude. De toute façon, un cigare ne sert qu'à enfoncer un clou. Confiant, je m'approche. Ils refusent de me laisser entrer. Je ne suis pas le DJ. Je leur explique qu'ils font erreur, que Chana la bombasse millionnaire à la réputation sulfureuse m'attend à l'intérieur. Rien n'y fait. Je me rétracte et propose de téléphoner à la miss. Elle ne répond pas. Le gars qui me refusait l'entrée appelle lui aussi "quelqu'un" et m'annonce tout tranquille que finalement c'est bon, je peux y aller. Par acquis de conscience, je rappelle aussi de mon côté. Elle répond. "Ah non, je n'y suis pas encore, mais oui je viens". Non, je n'entre pas. Je vais attendre un peu. Je vais en profiter pour aller acheter quatre biscuits, ça me fera un dîner. Une demi-heure, j'en prend quatre autres. Les gardes finissent pas m'encourager à entrer. Je leur explique que non, je préfère attendre mon "contact". A 10h, je la rappelle, once again. "Hein ? Non,je ne suis pas là, je ne suis pas partie encore. J'arrive dans 25 minutes. Mais tu n'as qu'à entrer". J'essaie de lui expliquer dans un mélange approximatif de français, d'anglais et d'espagnol que non, je ne rentre pas dans une boite louche où, ne nous étant jamais vu auparavant nous n'avons aucune chance de nous reconnaître et où le volume empêchera tout espoir d'entendre un téléphone sonner. Mon téléphone est justement d'une qualité déplorable et ni elle ni moi ne comprenons plus de la moitié de nos syllabes.
Dix minutes plus tard, je me recoiffe puis je rentre. Premier constat : La musique est supportable. Très bon point. Mes tympans survivront et l'expérience pourra éventuellement être retentée. Deuxième constat. Personne ne danse. D'ailleurs il n'y a pas beaucoup de monde. Il n'est que 10h15 me direz-vous. "Viens voir en France l'état de la nuit à 10h15". En France il n'y a pas de couvre-feu à 1h. Même les bars ne ferment pas aussi tôt le WE. J'attends dix minutes de plus. Le délai écoulé, je me tire enfin. Je tombe nez à nez avec "Ana la styliste à l'appart" qui tentait "l'opération inverse" avec certains de ses amis. Je rerentre avec eux, dans un vain espoir, l'utopie que les nuits guatémaltèques sont peut-être bien pour autre chose que leurs lumières, qui sait. Un quart d'heure plus tard, je vois se pointer "la ravissante poupée glaciale", "l'asiatique qui ne souriait pas". Elle a l'air de chercher quelqu'un. Si ça se trouve, en fait, je la connaissais, la Chana. "Clément ?". Faut croire que oui.
On échange quelques banalités d'usages, dans la limites de nos langues et du volumes. Elle termine par "tu es gay ?" - "non ... ?"  - "ah bon ... Je ne faisais que demander, on ne sais jamais, ne le prend pas personnellement surtout". Elle retourne s'assoir avec ses copains, pars danser avec l'un deux et disparait dans un élan d'inattention moins d'un quart d'heure plus tard. Je retourne "danser" avec "Ana". Il faut savoir que le guatémaltèque a une conception toute personnelle de la "danse". Plutôt que de danser en groupe, comme n'importe quel individu européanenement constitué, il se range en lignes, face à la sono et oscille tranquillement sans lever les pieds - ou le moins possible, parfois son équilibre le trahit un peu - et sans lever les bras au dessus de poitrine (ni les baisser en dessous de la ceinture). On pourrait croire à une reprise du mia, mais c'est encore un peu trop actif.
Vers minuit et demi, Ana et sa copine s'en vont. Las, je suis. Elles m'appellent un taxi. Elles sont adorables. A 2h, le taxi n'est toujours pas arrivé et la copine d'Ana appelle pour la quatrième fois l'agence - et me retransmet les dernières informations et consignes. Elle est vraiment adorable. La pauvre. Vers 3h, j'arrive enfin chez moi.

Samedi 14. Je me réveille à 6h. Les rideaux ne servent à rien. J'utilise ma couverture. Je me lève à 7h30. Vers 10h, Affoue appelle. On passe la matinée ensemble, on "fait du shopping", on "visite" des "jardins""organiser" "l'anniversaire de sa fille". "Sur la route", Affoue reçoit un coup de fil de Chana. Après lui avoir fait remarquer que son comportement était un peu déplacée, elle écoute attentivement le récit des "performances" de son "amant". J'ai droit aux commentaires. Résigné, j'inscris le premier nom féminin sur mon carnet. Nous nous quittons vers 15h pour aller chacun faire une sieste et se retrouver en début de soirée. D'ici là, l'ivoirienne doit trouver à meubler la fin du week-end. Je suis réveillé par mon téléphone à 19h. Il fait nuit, je me demande ce qui se passe, ce que je fais et pourquoi on me réveille en pleine nuit. Je finis par comprendre. Elle passe me prendre une demi-heure plus tard. Nous devons aller récupérer Ana, laquelle fini de travailler à 20h afin d'aller dans sa maison d'Antigua - on est riche ou on ne l'est pas. Elle ne l'est pas vraiment mais quand même. A Antigua, on mange et on sort. Nous partons à 21h. Nous arrivons une heure plus tard. Pile l'heure ou les restos ferment. Car non content de fermer les bars et toute vie nocturne à 1h, le gouvernement a décidé cet été de fermer aussi les restos à 10h du soir. Nous finissons par trouver un bar qui servent à manger. Conseillé par Ana. Une pizza maison telle qu'aucun d'entre nous n'oserait servir tant les ingrédients sont rares et fades. Dernière fois que j'écoute les recommandations culinaires d'un guatémaltèque. Ils sont comme les niçois. Nous finissons le repas peu avant minuit. En plus, le service est d'une lenteur désepérante. Nous cherchons quelques endroit ou finir la soirée - l'heure - sans vraiment en trouver. Nous passons le dernier quart d'heure dans un patio-bar plutôt mignon puis rentrons nous couchés, notre hôte étant crevée. Nous regardons "Death Proof" jusqu'à des heures indues. WE sauvé. 
Nous nous levons à 9h, nous regardons à nouveau death proof en attendant que la propriétaire se réveille. Nous petit-déjeunons en attendant qu'elle se réveille. Nous flânons en l'attendant. Nous nous embêtons en l'attendant. Puis vers 13h, nous la réveillons. Nous voulions être assez tôt à Guate. Le temps qu'elle se réveille, mange et se prépare, nous allons nous promener, revenons, tentons de la bouger. Nous partons vers 16h. Nous visitons un jardins où organiser l'anniversaire. Nous arrivons vers 18h dans nos domiciles respectifs.

Je me dis que les nuits locales ne peuvent pas être aussi pauvres, et puis je m'endors, bien résolu à rattraper le tout une semaine plus tard.

 

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